Julien Pingenot 
Après plus de cinq ans de sommeil, les cultistes de The Great Old Ones refont surface avec une nouvelle onirique et intrigante offrande. De nos jours, Lovecraft et Metal n’ont plus rien d’original et bien que l’œuvre du natif de Providence soit dense et complexe, ce sont généralement les mêmes histoires et clichés qu’on nous sert à longueur de journée. Bien que cela nous ait donné des groupes fantastiques ayant rendu hommage à l’œuvre et à son auteur de façon grandiose, plus les années avancent et plus les nouvelles formations qui s’entichent de l’imagerie lovecraftienne ne brillent plus par leur originalité. Même si musicalement, cela tient habituellement la route, Lovecraft est plus un prétexte pour avoir une pochette stylée et pas grand-chose de plus.
Alors que pour les cultistes bordelais, c’est une toute autre histoire. En effet, depuis 2012, avec la sortie de « Al-Azif », The Great Old Ones s’est toujours évertué à rendre plus palpables et vibrantes les nouvelles de Lovecraft. Chaque album est une invitation à un voyage cosmique et dément au travers des nouvelles de l’auteur de Providence. Après avoir mis en musique « Les Montagnes Hallucinées », « Le Cauchemar d’Innsmouth » et « L’appel de Cthulhu », pour ce nouvel album, le groupe a jeté son dévolu sur la mystérieuse et onirique nouvelle « La quête onirique de Kadath l’inconnue ».
Sans crier gare, « Me, the Dreamer » nous fait passer de l’autre côté du miroir, dans l’onirique monde des songes. Dès les premières minutes, le style si particulier du groupe est palpable. Bien qu’ayant fait évoluer son style, la patte TGOO est toujours ancrée et reconnaissable. Ce premier titre est tout simplement formidable. Ce morceau à lui tout seul justifie l’achat de l’album tant il est maîtrisé de bout en bout. Cette montée en puissance formidable, semblant infinie, nous faisant de plus perdre nos repères avec la réalité jusqu’à l’arrivée de cet incroyable climax époustouflant de grandeur et de majesté, nous amenant aux portes d’Ulthar. « Those from Ulthar » vient nous assommer avec son angoissante rythmique se densifiant de plus en plus au fil des minutes jusqu’à ce qu’un chœur venu d’ailleurs nous happe dans son étreinte. Mais ce qui paraissait être une faible lueur d’espoir, nous sommes finalement catapultés en pleine torpeur et petit à petit la folie s’empare de nous. « In the Mouth of Madness » est lancinante, entêtante et illustre à merveille notre descente infernale avec ce refrain scandé à tout rompre sur la fin du morceau… « Under the Sign of Koth » vient nous sortir de notre infernale torpeur à grand coup de blast beats et de furieux tremolo. Beaucoup plus rentre dedans et direct dans sa composition, ce morceau est du pur The Great Old Ones. Un morceau puissant et évocateur où folie et majesté se côtoient tout du long. Le très bienvenu interlude « The Gathering » vient quelque peu nous faire respirer après l’océan de noirceur qu’étaient les derniers morceaux. Une longue minute d’une douceur qui légèrement se teint et semblant de plus en plus mystérieuse et inquiétante. Puis le monumental « Leng » prend la suite. Fresque instrumentale de quinze minutes juste immense et intimidante de maîtrise. Ce morceau fleuve montre un groupe en totale maîtrise de ses capacités. Tout y est grandiose et majestueux. Et après ce fantastique moment, est venu l’heure de la conclusion de ce rêve aux confins du cosmos et de la folie avec « Astral Void (End of the Dream) ». Morceau tout aussi magistral que le reste et montrant une dernière fois un groupe plus qu’inspiré et ne paraissant jamais à court d’idées.
Avec sa pochette signée Jakub Rebelka, qui a illustré la fantastique BD « Le Dernier Jour de Howard Phillip Lovecraft », The Great Old Ones opère un immense retour en ce début d’année 2025. La carrière des Bordelais est un sans-faute jusque-là, et ce n’est pas avec « Kadath » que cela va s’arrêter.
Artiste : THE GREAT OLD ONES
Album : Kadath
Date de sortie : 24 Janvier 2025
Label : Season of Mist
