"Cure" - ERRA
Chronique par Estelle Poilâne – 06/04/2024
Après un quatrième single dévoilé le 14 mars dernier, le groupe de metalcore progressif ERRA est de retour avec son sixième album intitulé « Cure », disponible depuis hier. Comme son éponyme prédecesseur, ce nouvel opus paraît sous le label UNFD. Le quintette américain a, pour cet album, travaillé avec le producteur Daniel Braunstein, qui a notamment collaboré avec Spiritbox, Dayseeker et Volumes. Avec quinze ans d’expérience à son actif, ERRA a toujours su convaincre et nous offre ici des riffs complexes et percutants, alliés à des éléments mélodiques des plus captivants. Trois ans après son dernier album, le groupe nous transporte au cœur du métal progressif avec des sonorités davantage accrocheuses.
« Cure », premier single de l’album et morceau-titre, donne immédiatement le ton : gros sons graves aux riffs puissants et sombres, accompagnés de petites harmonies dans les aigus des guitares venant enjoliver le riffing, et une batterie bien mise en avant. L’alternance entre chant aérien et chant crié associée à la lourdeur des riffs donne de l’ampleur. Ce premier titre intense détruit tout sur son passage et cette composition réunit toutes les qualités du genre.
S’ensuit « Rumor Of Light », titre parfois déroutant tant il est varié ! Sans être très sophistiqués, les riffs sont efficaces. Ce morceau parfois plus calme comporte même des passages aux sonorités un peu pop-rock. À part égale, le titre combine voix criée et voix claire. La technicité du solo de guitare en milieu de chanson apporte un réel plus à celle-ci. Les parties plus calmes du morceau sont entrecoupées d’arpèges à la guitare avec beaucoup d’effets.
Bien mise en avant, la double pédale dans « Idle Wild » accompagne avec brio les riffs de guitare. Les intonations de voix claire (et doublée) de ce troisième titre nous font même, par moments, penser à la grande période du Hard Fm durant les années 80. Titre qui n’est pas d’une grande originalité, mais qui a le mérite d’être dynamique et efficace.
L’atmosphère planante de « Blue Reverie » nous envoûte tant elle est hypnotique. Les thèmes de la solitude et de l’anxiété y sont abordés. Titre poignant, on se laisse alors emmener dans un voyage émotionnel à travers ce morceau musicalement surprenant et très bien structuré. Le mixage de cette chanson est excellent.
« Slow Sour Bleed », tout dernier single, contient de jolies mélodies vocales contrebalancées par la musique sombre et atmosphérique qui les accompagne. Le pont sonne electro et on en oublie presque qu’il s’agit d’un groupe de métal ! Ce morceau brutal nous laisse déjà imaginer celles et ceux qui vont se déchaîner lors de son interprétation en live.
Le court et apaisant interlude instrumental « Wish » vient casser la dynamique de l’album avec de beaux arpèges à la guitare, ainsi que du delay.
« Glimpse » mêle breaks et riffs acérés, mais reste cependant l’un des morceaux les plus lents de cet opus. Sur un même riff, on passe d’une voix criée à une voix douce, légère. Les harmonies vocales sont magnifiques. Le jeu de batterie s’avère moins démonstratif et la grosse caisse est ici, vraiment mise en avant. Ce septième titre pourtant énergique se termine en arpèges avec un delay accompagné d’une forte reverb, et c’est très agréable.
ERRA sait tout faire et « Past Life Persona », relativement plus doux, nous le démontre. La force du groupe réside en partie dans son habilité à toujours user dignement des harmonies. On retrouve dans ce morceau une certaine touche de pop. La voix claire presque angélique vient contraster avec les accords de guitare très saturés.
L’album gagne en densité avec « Crawl Backwards Out Of Heaven », morceau encore plus percutant et l’un des plus violents de cet opus. Les riffs de guitare y sont percussifs et syncopés. Les harmonieuses pistes de guitare additionnelles se situent dans les aigus et accompagnent les accords très graves, ce qui permet d’aérer le morceau. Ce retentissant quatrième single fait donc prendre une tournure beaucoup plus sombre à l’album et nous démontre la maîtrise technique du groupe.
« End to Excess » est probablement, dans l’ensemble, la chanson la moins agressive de « Cure », et le refrain en est presque mélancolique. Cela dit, le titre s’inscrit dans la continuité des premiers, et les riffs sont ici toujours lourds et graves.
Le très bon « Pale Iris » sorti en août 2023 (et oui, déjà !), commence de façon brutale pour ensuite créer une tension qui va finalement retomber pour laisser place à une énergie frénétique. Ce morceau se révèle être un des plus impactants de cet opus.
Morceau de clôture, « Wave » est très représentatif du métal progressif que propose ERRA. Avec son rythme rapide aux riffs mélodiques, son duo de vocalistes qui fonctionne à merveille, ainsi que son pont suivi d’un (court) solo, le groupe nous propulse dans un univers qui lui est propre. Les cinq musiciens terminent en beauté, s’imposant comme un des rares groupes du genre à exécuter un album avec une telle précision.
ERRA possède la grande capacité de se réinventer à chaque album. En effet, le groupe de metalcore progressif américain aux sonorités tantôt agressives, tantôt mélodiques, confirme ici une fois de plus son talent, en nous entraînant titre après titre, dans un tourbillon d’harmonies. Encore différent de son album éponyme paru en 2021, ERRA réalise avec « Cure » une vraie prouesse : celle d’être aussi puissant et pertinent émotionnellement que musicalement. Doté d’une richesse exceptionnelle, le sixième opus du quintette est un album accompli, qui ravira les fans de Parkway Drive, Architects ou encore While She Sleeps ! Il est, en plus d’être soigné pour chacun de ses morceaux, admirablement bien produit, et met en valeur toute l’ingéniosité de la formation metalcore grâce à son énergie intense. Évoluant constamment, le groupe n’a visiblement pas fini de nous surprendre. C’est donc un retour triomphant pour ERRA, qui démarre sa tournée nord-américaine dans quelques semaines ! Il ne reste plus qu’à espérer une date française afin d’expérimenter ces nouveaux titres en live…
ERRA – « Cure »
5 avril 2024
UNFD