Chronique – NO ONE IS INNOCENT « Colères »

Trois ans après Ennemis, un album unanimement salué tant par la critique que par les fidèles de la première heure, No One is Innocent signe un grand retour avec Colères, sorti sur le Label VeryShow le 27 septembre 2024. 

Cet opus, présenté comme un « vrai faux best-of » dresse en 23 morceaux un panorama vibrant de la trajectoire du groupe, entre fulgurance électrique et engagement viscéral. Cette compilation marque tout d’abord l’amorce d’une nouveau chapitre : l’arrivée de nouveaux musiciens et une série de concerts à venir. Mais surtout, les morceaux inédits proposés ne sont pas de simples reliques sorties du placard, ce sont des titres profondément ancrés dans le présent, qui témoignent de la fougue et de l’engagement qui caractérise le groupe depuis ses débuts. 

C’est là toute la puissance de No One is Innocent : cette capacité à se renouveler sans jamais renier sa colère fondatrice. Toujours en résistance, le groupe continue de dénoncer les oppressions ( racisme, censure, individualisme) tout en explorant de nouveaux terrains musicaux mêlant rock brut, élans Hip-Hop ou textures électro. Une réinvention constante, à la fois engagée et organique.

Oscillant entre les titres les plus connus ( Kids are on the run aux inspirations punk, Ali king of the ring qui allie métal fusion et heavy rock), des live qui témoignent de l’effervescence du public durant leurs shows ( Nomemklatura, sans oublier le discours poignant de Charlie Hebdo), et de titres revisités avec virtuosité ( Massoud, La Peau, Le Poison), ce sont trente années de musique, de révoltes qui défilent dans nos oreilles.

En effet, No One is Innocent illustre une fois de plus que le métal est le genre qui se prête le mieux aux mélanges en collaborant pournla première fois avec le Lahad Orchestra, notamment sur l’immense titre Massoud, hymne à la rébellion et à la liberté, lui conférant des allures plus orientales. Ce n’est d’ailleurs pas la première fois que le groupe se prête à ce genre d’exercice : en effet, leur première album ( No One is Innocent )revêtait des accents jazz, tandis que quelques autres de ceux qui l’ont suivi se sont parés de mélodies plus électroniques ( Révolution.com, Drugstore …).

Loin de se contenter d’un simple regard dans le rétroviseur, Colères s’enrichit de deux titres inédits ( enregistrés en Mai 2024), témoins d’une colère toujours vivace : L’Arrière boutique du mal déploie une tension sourde, portée par des riffs obsédants et des vagues sonores qui se heurtent aux paroles incisives de Kemar, aussi féroces que lucides. Quant à Dérèglement politique, il dresse avec une ironie amère le tableau d’un monde en perte de repères. L’orchestrait, puissante et fidèle à l’ADN du groupe vient souligner ce constant sans concession. Cependant, comme le note le chanteur dans une récente interview :  » Réduire les dangers de notre époque à ces seuls thèmes serait trop simpliste. C’est un tout, une ambiance globale d’instabilité qui nous pousse à écrire ».